L’Ukraine et la fracture du monde orthodoxe.

, par Pascal HOCANTE

En Ukraine, l’orthodoxie est profondément divisée entre une Église indépendante et une Église rattachée au patriarcat de Moscou. Si la religion n’est pas un élément déterminant de la guerre qui se déroule actuellement, le conflit entre la Russie et l’Ukraine se nourrit aussi de cet aspect religieux :

11/03/2022
Document de l’IREL, Institut d’étude des religions et de la laïcité.

L’État ukrainien a voulu cette indépendance religieuse afin de sortir de l’orbite spirituelle de Moscou, et la Russie utilise l’orthodoxie pour justifier l’idée d’absence de différences entre les Russes et les Ukrainiens. L’existence de ces deux Églises est le résultat de l’histoire tumultueuse de la région, de l’organisation très particulière des Églises orthodoxes et des évolutions récentes des rapports entre le patriarcat de Constantinople (qui est à l’origine de l’Église ukrainienne indépendante) et le patriarcat de Moscou, bras spirituel et élément de la stratégie d’influence de l’État russe.
Le conflit en Ukraine a aussi une dimension religieuse. Cet aspect, peu connu en France, a pourtant d’importants effets sur le monde orthodoxe, et doit être replacé dans le contexte des évolutions récentes des rapports entre Églises orthodoxes. La crise vient en partie des structures même de l’orthodoxie : il n’y a pas, à proprement parler, une Église orthodoxe unifiée avec un chef unique, comme c’est le cas pour l’Église catholique. Le monde orthodoxe est composé de plusieurs Églises autocéphales, c’est-à-dire indépendantes : le primat de chaque Église n’est soumis à aucune autorité religieuse extérieure. Pour autant, ces Églises ne sont pas séparées, car il n’y a aucune différence doctrinale, elles ont la même liturgie (le rite byzantin), et les sacrements administrés dans une de ces Églises sont considérés comme valides par toutes les autres. L’unité de l’ensemble est assurée par la coopération harmonieuse entre les primats de chaque Église. Les brouilles sont régulières mais généralement temporaires. Pourtant, depuis 2018, un schisme entre Moscou et Constantinople menace l’unité de l’orthodoxie.

En savoir plus...

- Autocéphalie et phylétisme
- Constantinople et Moscou
- Le schisme de 2018
- L’invasion russe de 2022

Institut d'étude des religions et de la laïcité